Karim Abdelaziz

Karim Abdelaziz

Karim Abdelaziz – Houria-Liberté

Revue Le bruit du monde (sélection 2014)

Je suis comédien et auteur. L’écriture a toujours été là quelque part autour de moi et en moi ; ma mère est auteur. La machine à écrire faisait partie des meubles, des objets familiers comme les tasses à café ou la cocotte-minute. A l’école j’aimais écrire des rédactions fouillées, peaufiner le style, en faire une sorte d’objet d’art personnel. C’est pour moi que j’écrivais. Puis ça s’est arrêté là, en tout cas sur le papier, mais- et je le réalise maintenant- c’est comme si ça continuait à écrire dans ma tête, au travers des rencontres, des voyages, des expériences plus ou moins heureuses de la vie… Et j’ai mené mon existence d’adulte en devenant acteur. Mais toujours avec cette sorte de rêve d’ « écrire ». Au travers de certains projet théâtraux, notamment un travail mené avec une compagnie implantée sur un territoire, nous avons rencontré des habitants et leur avons demandé de nous livrer la perception qu’ils avaient de leur ville, pour ensuite soumettre ce matériau par écrit à des auteurs de théâtre. Le réel se mêlant à l’imaginaire. Et là, en transcrivant ce que je percevais de leurs témoignages, j’ai retrouvé un goût passé… Puis j’ai mené un atelier que je mène toujours avec des jeunes trisomiques et psychotiques d’un IME (Institut médico-éducatif), et là je me suis dit que j’avais envie d’écrire pour eux, de mettre en scène ce que j’écrivais. Comme si je n’avais pas le choix. Depuis je n’ai pas arrêté. Il y a eu Houria-Liberté qui est un témoignage, un journal de bord, il y a ce texte sur la guerre de 14 que je viens de terminer d’écrire ; un monologue que je vais, comme Houria, porter seul en scène. Assumer l’auto-mise en scène de sa propre parole est une gageure qui me plaît…Vivre et sentir ce passage de l’intime au public, ça m’excite beaucoup.

Houria-Liberté

En Février 2007, je pars à Oran en Algérie à la rencontre d’une partie de ma famille, et d’un pays que je ne connais pas. Le pays de mon père décédé 6 ans plus tôt, et qui n’est jamais retourné chez lui. Ma tante me raconte ce rêve dans lequel mon père lui a parlé : « Moi je ne viendrai pas c’est trop tard. Mais Karim va venir… » Je découvre une société marquée par la guerre civile passée, le poids du religieux, la pensée qui me semble circuler difficilement. Et puis des gens émouvants dans leurs contradictions, des moments de soleil. Et puis Houria, intemporelle. Houria-Liberté n’est pas le récit d’un voyage en Algérie, mais d’un voyage en soi. Avec des tempêtes et des insomnies et des joies inattendues. Une quête. Celle de tout être humain qui se met en marche.