Ecrire pour le théâtre. Ecrire pour un art fragmenté, incomplet. S’y plaire. Y retrouver le saccadé de la vie, l’incomplétude, l’incohérence, le trouble. Donc pas de roman, du théâtre.
Entrer au théâtre par le jeu. Roméo et Juliette, Hamlet, La Conférence des oiseaux de Jean-Claude Carrière, Le Mariage de Gombrowicz. Croisement d’influences tenaces. Le théâtre de tréteaux, le baroque, le conte, l’expression corporelle, l’absurde, le fantasmagorique.
Bribes d’écrits. Quelques carnets, aucune pièce.
Enfouir tout ça. Rentrer à sciences po. Découvrir les sciences sociales. Penser comprendre comment ça marche. Soif de connaître, apprendre. Croire en la politique qui peut changer les choses avant qu’elles ne vous changent. (Y revenir plus tard). Le théâtre revient par la petite porte.
Puis rupture. Penser à Marc Zuckerberg. Ecrire pour s’occuper. Frénésie pour oublier. Tout jeter sur le papier, les influences, les pensées, les actualités. Beaucoup de naïveté, mais de la sincérité. Voyages, Etats-Unis, Allemagne, Turquie, Balkans. Légèreté de vivre. FN en France, Clément Méric, manif pour tous qui saute à la gueule. Culpabilité de buller. Conjuguer théâtre et engagement. Mais comment ?
Citoyens du vent. Premier texte. Première mise en scène. 2014. Formation sur le volet. Exaltation. Frustrations. Se sentir à sa place. Vouloir échouer mieux.
Une rencontre. Joël Pommerat. Atelier de recherche sur la révolution. Plonger dans les archives, les discours. Rerentrer dans la politique, côté théâtre. Observer le regard, l’exigence, l’écriture d’un grand. Parler de tout, de rien. Ecouter les conseils, ce que c’est d’écrire, la solitude, la volonté, la détermination.
A mon tour. M’approprier ce que j’ai vu et senti. La révolution, oui. Plus proche. Les années 70, un héritage précédé d’aucun testament. Plonger dans ces années de poudre. Y chercher la passion politique. Regarder les infos, l’histoire bégaie. Ecouter les politiciens. Regarder sur les bancs de classe ceux qui demain seront à leurs places. Sympathiser avec des idées anarchistes. Lire Rancière, le comité invisible, Le Rivage des Syrtes de Gracq, Lorenzaccio de Musset. Confondre tout cela.
L’âme rongée par de foutues idées. 2016. Deuxième texte, deuxième mise en scène. Ecriture au plateau. Conjuguer l’intime au politique. Chercher une expérience de la conflictualité. Exaltation. Frustrations. Préparer le prochain échec.
L’âme rongée par de foutues idées
Une loi pour le bien des salariés comme des employeurs, une de trop. Le murmure d’assemblées spontanées. Le dédain de quelques politiciens. Des coups de poing policiers sur des gens menottés. De nouveaux révoltés, toujours plus. Des voitures qui brûlent sur le pavé. Des appels au calme, isolés, ridiculisés. Des négociations qui échouent. Des travailleurs en grève, un pays paralysé. La révolution au bout des lèvres. L’émeute qui se fait insurrection.
Puis
L’ordre règne, à nouveau.
Ce qu’il reste ?