Anne-Sophie Dionot – Les murs de ma peau –
Présentez-vous. Ils veulent toujours qu’on se présente. Mais présentez-vous donc Mademoiselle. C’est quoi cette manie de la présentation ? Ce désir de vouloir mettre des mots qui nous définiraient. Des mots qui diraient qui nous sommes. Sans détour, sans courbes. Des mots classiques pour une vie classique.
Capucine. Violette. Manon. 1m73. Ou 1m68. 52 kg. Peut-être 85. Etudiante en philo.
Prof de maths. Infirmière. Comédienne. Secrétaire. Pompier volontaire. Yeux marron. Ou bleus. Ou verts. Ou noisette au centre, verts sur l’extérieur, avec des éclats jaunes par endroit. Des yeux qui voient. Des yeux qui sentent. Des yeux qui se posent sur le monde. Qui pleurent parfois et qui font pschuit quand on y allume des allumettes. Des yeux vivants, quoi. Des yeux qui transpirent la peur, l’amour, l’attente, le désespoir, l’ennui, la colère. Des yeux vivants. Des yeux plein de mots. De tous ces mots qu’on cherche pour ne pas se présenter.
Mais présentez-vous, on vous dit.
Je retourne dans ma boîte à musique cérébrale remonter les ressors qui pousseront les murs de ma peau :
Comme souvent, j’ai eu le titre avant d’avoir l’histoire. Mais la vraie vie est très vite venue me frapper avec sa réalité terrifiante. Et comme souvent, j’ai eu besoin de métaphoriser la vraie vie avec des mots de théâtre. Alors voilà, ça parle de suicide. Ça parle de colère, de haine, mais d’amour aussi. Beaucoup. Et puis c’est drôle. Quand même. Ça questionne sur ce passage à l’acte. Ça me questionne, moi qui suis amoureuse de la vie. Ça dit à quel point c’est dur, mais aussi à quel point c’est beau, la vie. Ce n’est qu’un début. Une ébauche. Mais je sais déjà que ça ne finira pas mal.
Même si ça ne finit pas bien.